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Rss Lanzmann initié aux toros par Simone de Beauvoir . De Jacques Durand
Pour Claude Lanzmann, auteur du film Shoah et directeur des Temps Modernes, la politique taurine des autorités catalanes est «incompréhensible» et l’interdiction des corridas dans la région «une erreur absolue» et «une honte». C’est ce qu’il a affirmé début janvier à des journalistes de quotidiens espagnols et catalans venus l’interviewer pour la parution en espagnol de son livre le Lièvre de Patagonie. Où en quelques pages il dit son «admiration» pour la corrida et la passion que, pour la tauromachie et dans les années 50, lui a «inoculée» Simone de Beauvoir, dont il partageait la vie.

Affiches. Lanzmann a découvert la course de taureaux grâce au couple Sartre - Beauvoir et son afición a, à l’époque, été alimentée par Jean Cau, secrétaire de Sartre. Dans l’été 1955, avec Simone de Beauvoir qui rêvait de suivre une temporada, Lanzmann courait l’Espagne de Huelva à Valencia pour suivre la saison et voir par exemple Aparicio et Litri se mesurer aux Miuras. Et voir à Valencia Cháves Flores se faire grièvement blesser par l’un d’eux.

Comme tout aficionado compulsif, Simone de Beauvoir achetait des affiches taurines avec quoi elle décorait les murs de son atelier, rue Schœlcher à Paris XIVe, acheté grâce au prix Goncourt remporté avec les Mandarins. Elle avait connu la corrida avec Sartre dans les années 30 lors d’un voyage en Espagne évoqué dans la Force de l’âge. Dans Entretiens avec Jean-Paul Sartre (1), le philosophe lui avouera que la course de taureaux avait compté «énormément» pour lui, qu’il fallait «penser sur elle» et «tâcher de trouver son sens».

«Mordue». En Espagne, le couple se rendait aux arènes «chaque dimanche». Simone de Beauvoir : «Les toreros les plus réputés, cette saison-là, c’était Martial Lalanda et Ortega [Domingo Ortega, ndlr]; les Madrilènes appréciaient aussi beaucoup un jeune débutant, surnommé El Estudiante, qui se distinguait par son audace. Je les vis tous les trois et je compris que le taureau était bien loin de donner infailliblement dans le leurre : pris entre les caprices de la bête et l’exigeante attente des spectateurs, le torero risquait sa peau; ce danger était la matière première de son travail : il le suscitait,il le dosait avec plus ou moins de courage et d’intelligence; en même temps, il l’esquivait avec un art plus ou moins sûr. Chaque combat était une création; peu à peu, je démêlai ce qui en faisait le sens, et parfois la beauté. Bien des choses encore m’échappaient, mais je fus mordue, Sartre aussi.»

Et Claude Lanzmann trente ans plus tard avec elle. Mordu en particulier par les Miuras. Le 9 octobre, au journaliste d’El País qui, parlant de sa réputation d’homme au caractère épineux, évoquait le nom de Miura, il répondra : «C’est un honneur que vous me compariez à un Miura. Les corridas m’enchantent et concrètement les toros Miura. Après ma mort j’aimerais me réincarner dans l’un d’eux.»

(1) Simone de Beauvoir, «Entretiens avec Jean-Paul Sartre, août-septembre 1974», Gallimard, 1981
 
 
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Ecrit par: tem40, Le: 13/10/11


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