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Comme chacun sait, un marché est le lieu de rencontre entre une offre et une demande. Cette rencontre détermine une quantité échangée (de travail, de production, de monnaie, de titres) et un prix de vente (salaire, prix des biens, taux d'intérêt, cours boursier). Dans une économie libérale il appartient au marché de trouver son meilleur équilibre, mais lorsque cela s'avère impossible il n'y a d'autre issue qu'une régulation forcée.

Car s'il est indéniable que les lois de l'offre et de la demande ne peuvent véritablement fonctionner que sur un marché parfaitement concurrentiel, dès lors que l'on assiste à la main-mise d'un des agents - en l'occurence le G10 - sur l'établissement des prix, l'intervention des autres agents - les empresas - devient nécessaire pour préserver la viabilité du système et les intérêts du client - le public -. Le risque, d'un côté et de l'autre, est bien sûr de tomber sous le coup des dispositions légales qui condamnent les ententes illicites destinées à fausser le libre jeu de la concurrence, ce qui a priori peut paraître être le cas, tant quand les toreros du G10 s'entendent pour fixer le seuil des honoraires minima qu'ils s'engagent entre eux à ne pas baisser, ou quand les arènes fixent celui qu'ils ne dépasseront pas.

Reste que dans l'absolu il sera difficile de considérer que la charte des arènes française fausse les lois de la concurrence, dans la mesure où, d'abord, elles ne représentent qu'une infime minorité sur l'ensemble du marché, et que, ensuite, les toreros conservent toute latitude pour refuser cette mesure d'austérité qui leur est proposée dans l'intérêt du système. Rien ne leur interdit d'accepter les conditions qu'on leur propose et ils peuvent refuser de venir toréer dans les arènes concernées.

On peut toutefois penser que cette situation de blocage ne se produira pas dans la mesure où personne n'a intérêt à considérer le problème sous le seul angle commercial, surtout depuis que les toreros ont présenté le G10 comme un groupe de travail destiné à promouvoir la tauromachie sous l'angle culturel. Il faut donc les prendre au mot et leur expliquer qu'il ne peut y avoir de culture prospère si son économie la mène à la ruine, ce qui est le cas quand les dépenses dépassent les recettes et qu'aucune subvention ne vient compenser le manque à gagner. Et dans la mesure où les recettes ne remonteront pas tant que la crise imposera ses coupes sombres, ce sont bien les dépenses qu'il faut réguler.

Annoncée depuis plusieurs semaines, la réunion des sept arènes françaises de première catégorie répond à cette nécessité, dans la mesure où il était devenu impossible pour chacune d'entre elles d'envisager l'avenir avec sérénité en raison de la dérive chronique des honoraires des figuras, qui, même en période de grave crise économique, n'avaient cessé d'augmenter, comme si la bulle taurine était à l'abri des contingences qui ébranlent la société.

Dans un communiqué publié au terme de leur réunion les sept arènes françaises évoquent donc les termes d'une charte qu'elles s'engagent à respecter désormais, avec pour mesure phare la diminution de 20% des plus gros salaires et la revalorisation d'autant des plus modestes. Mesure habile, cette dernière, qui rend difficile pour les figuras de crier au hold-up et à l'injustice.

Dans les motivations de cette hausse accordée aux toreros modestes qui habituellement sont engagés pour combattre les corridas dures, il faut aussi voir la volonté des sept arènes de revaloriser celles-ci, ce qui constitue une mesure très positive au moment où, en Espagne, diverses voix pas forcément dénuées d'intérêt s'élèvent contre le "torisme".

Cette régulation du marché français qui devra passer par une rencontre avec les représentants du G10 afin que les mesures annoncées soient comprises et acceptées, devrait permettre à ces arènes de juguler les effets de la crise qui, pour les empresas privées soumises à un taux de TVA inadapté est synonime de ruine à moyen terme, et de frictions politiques sur fond de finances publiques pour les villes gérant leurs arènes en régie.

Peut-on pour autant assister à une épreuve de force que voudraient imposer les figuras qui, par exemple, pourraient baser leur saison française sur des arènes secondaires comme Istres, Palavas ou Chateaurenard ? Cela semble peu probable, d'abord parce que dans ces arènes on les paierait moins encore pour la simple raison qu'ils y sont déjà allé et ne les ont pas remplies. Et puis, qui peut décemment trouver scandaleux qu'au delà d'un seuil fixé à 60.000 euros un effort soit demandé aux plus favorisés ? Lorsque l'on sait que les honoraires de certaines figuras atteignent parfois 180.000 euros, voir ceux-ci réduits à 144.000 est-il un effort insoutenable ?

Grâce à cette charte que les sept principales arènes se sont engagées à respecter, l'avenir de celles-ci peut s'envisager de manière beaucoup plus positive, avec, à terme, pourquoi pas, une baisse du prix des places grâce à celle du taux de TVA qui, depuis l'inscription de la corrida au patrimoine culturel français, ne correspond plus à la nature du spectacle. Après des décennies d'immobilité, le monde taurin français s'est mis en marche pour prendre en mains sa destinée en régulant son marché de manière solidaire et collective, non par souci égoïste de rendre celui-ci plus rentable, mais parce que cette démarche est la seule qui convienne en matière culturelle si l'on veut permettre à tous de pouvoir en profiter.


André Viard

http://www.terrestaurines.com/forum/actus/edit.php



tem40 Le: 23/10/11
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